La Somme

Afin de préparer notre projet Veehaldjas, nous avons défini une randonnée d’essai sur la Somme au mois de décembre 2021. Le but de cette randonnée n’est pas de faire de la très longue distance mais bien de tester le matériel.

Au programme donc : 95km entre Sailly Laurette et la Baie de Somme ; 9 passages d’écluses et 2 portages pour repasser sur la Somme sauvage.

Jour 1 : Sailly Laurette - Lamotte Brebières

Arrivée sur zone, le temps est plutôt clément, température légèrement positive et pas de pluie.

Après avoir gonflé le SUP, mise en place des sacs étanches à l’avant et à l’arrière. Le sac le plus lourd est mis sur l’avant afin de ne pas trop délester l’arrière et godiller durant la rame.

J’ai choisi de fixer les sacs par des sangles et non pas par le système d’élastiques présents sur le SUP. Après essai dans mon salon, je trouve que la mise en place est plus aisée et surtout je vais devoir les enlever et remettre de nombreuses fois à cause des portages. Les systèmes élastiques sont très efficaces, maintiennent très bien mais je trouve que l’installation de très gros sac n’est pas aisée lorsque l’on est seul. Pour rappel, le sac à l’avant fait 140l et pèse pas loin de 23 kg.

A l’arrière, là encore un sac de 140l mais quasi vide, seule la pompe et quelques accessoires sont présents. Le chariot est quant à lui mis sur le sac à l’arrière, attaché avec 2 sangles à clips.

Première mise à l’eau, je pousse la planche du ponton. C’est lourd, c’est peu dire, planche + sacs, on n’est pas loin de 40kg de matériel. Niveau flottaison, le SUP est équilibré, c’est parti.

La Somme est pour sa majeure partie canalisée donc la navigation est facile. Le courant ne nous porte pas, il est franchement quasi inexistant donc si tu ne pagaies pas, tu n’avances pas.

Cette première demi-journée permet de prendre mes marques, d’admirer les paysages marécageux qui m’entourent et de profiter des oiseaux qui m’entourent. Ici, pléthore de canards, de hérons, aigrettes, foulques macroules, cormorans et bien d’autres dont je ne connais pas les noms. Ici, c’est sauvage, pas simple de les prendre en photo, ils s’envolent dès que l’on approche.

Après 9,5km de rame, j’arrive à Corbie. Heureux de retrouver un bateau à fond plat qui me rappel les Pays Bas et la SUP 11 City Tour. Les souvenirs refond surface, les amis, la difficulté de l’épreuve, les apprentissages, de bons moments.  Corbie, c’est l’occasion de tester le premier portage, de voir si ce que j’avais vu sur la Charente en juillet 2021 m’a servi. Premier point positif, le bout de 4m avec mousquetons fixés à l’avant du SUP, je valide. Cela permet à l’arrivée d’arrimer le SUP et donc de ne pas se stresser avec une planche qui partirait à la dérive. Ma technique du jour, sortir le SUP par l’arrière, enlever l’aileron, et tirer pour mettre le SUP sur le ponton. Après, ça se corse, il faut monter le SUP sur le chemin de halage, donc porter les 40kg à bout de bras, sans que cela soit bien équilibré, sinon ce n’est pas drôle. J’évite le tour de reins, je monte le chariot et c’est partie pour contourner l’écluse. Après, c’est simple, on refait de même mais dans l’autre sens. Bon, là je me dis que ce n’est pas terrible. L’arrimage avec le bout, je valide, le chariot, je valide, ne pas sortir les sacs pour remonter les sacs, une erreur.

Je poursuis mon chemin et j’arrive à l’écluse de Daours, ici, terrain chaotique, des mottes de taupes partout, ça s’annonce mal avec le chariot. Heureusement, Joseph est là. Joseph travaille pour le conseil départemental et s’occupe d’élaguer quelques arbustes le long de la Somme. Quand j’arrive, il me dit : Ah c’est vous Paddle For Earth !! Je tombe des nues, comment il me connait ? là il m’explique qu’il a vu passer ma demande par mail au conseil général pour avoir l’accord pour bivouaquer à l’écluse de Lamotte Brebières. On discute un moment, de son travail, de la Somme, du charme de la faune et flore et il me propose son aide pour passer le matériel d’un côté à l’autre. Le Top !! et oui, la randonnée en solitaire, c’est aussi çà, l’opportunité de faire des rencontres. Merci Joseph, je repars pour ma dernière ligne droite vers mon bivouac du jour.

5km plus loin, je touche au but : Lamotte Brebières. Coin calme, sortie de l’eau facile, tout s’annonce bien même si la brume commence à tomber et le froid se fait de plus en plus ressentir. Une nuit fraiche s’annonce mais pas encore la pire de la semaine, demain, cela doit descendre autour de -3 degrés dans la nuit. Je me presse pour monter la tente, une 3 saison. Je me mijote un bon repas, à base de lyophilisé. C’est bien meilleur chaud, j’avais testé froid en juillet puisqu’il parait que cela marche aussi, alors oui ça marche, mais ce n’est pas bon et en décembre, la chaleur est bienvenue. Je m’accorde un peu de lecture pour préparer la Loire 725 de juin 2022 et voilà, 16h30, je ne vois plus rien. Je décide d’économiser les batteries de la frontale donc je me couche en mode ninja, le duvet est limite, -3 degrés en confort (enfin ça c’est ce qui est marqué, je ne suis pas très frileux mais je n’y crois pas et ça se confirmera le lendemain)

JOUR 2 : Lamotte Brebières - Picquigny

La nuit a été fraiche, ça se confirme. J’entrouvre la tente, le soleil se lève, le givre sur mon SUP brille tel de petits diamants. La journée s’annonce bien, fraiche mais bien. La nuit a été correcte, je suis super content de mon matelas qui isole extrêmement bien du sol. Côté tente, pratiquement pas de condensation, pas de givre à l’intérieur, un peu à l’extérieur. Pour une première, ça passe. Petit déjeuner eu lyophilisé, ça sera mon lot quotidien puisque je pars sur un petit déjeuner et un diner à 1000Kcal et après en journée, amandes, figues ou bananes séchées et de l’eau. Il me faut 1l par jour pour la nourriture et globalement 2l pour la journée, à minima. La sécurité pousse pour avoir 4l d’eau en permanence. Je profite de mon petit déjeuner devant se spectacle que m’ouvre les éléments. Pas de stress, le jour tarde à vraiment se lever et je ne naviguerai que lorsque la luminosité sera suffisante.

Je replie le matériel, j’enlève le givre de la tente comme je peux, idem sur le SUP, je ne suis pas trop friand d’avoir du givre sur ma zone de pieds. Mise à l’eau et c’est repartie pour 25km. A ce moment de la journée, c’est magique. La planche glisse tranquillement, aucun bruit mis à part celui des canards qui cancanent. Les rayons du soleil se reflètent sur une rive, le plan d’eau est un miroir dans lequel tout se reflète. J’ai l’impression d’être en montagne et de faire la première trace dans la poudreuse, vous savez, cette sensation d’être le premier à passer, le premier à découvrir cet endroit, de s’en imprégner, de se laisser happer par le moment présent. J’arrive aux hortillonnages d’Amiens. Les hortillonnages sont des marais qui sont utilisés pour la culture maraichères. Aujourd’hui il ne reste plus que 300 hectares mais à l’origine, ils faisaient 10 000 hectares. La première cartographie connue date de 1524, une longue tradition donc. Des balades en kayaks sont organisées pour visiter ces marais et y admirer la faune et flore. Je ne ferai qu’un passage pour ma part, ça sera l’occasion de revenir pour découvrir plus longuement ce site.

Après quelques coups de pagaies, j’arrive dans Amiens. Je remonte vers le magnifique club nautique d’Amiens pour une pause amandes. L’architecture est magnifique. Ce club a été fondé en décembre 1865.

Je ne suis qu’à quelques mètres de la sculpture de l’Homme sur sa bouée de Stephan Balkenhol, il serait dommage de ne pas en profiter, ce n’est pas tous les jours que l’on a l’occasion de la voir sous cet angle. « L’Homme sur sa bouée » sous sa forme actuelle n’est pas la sculpture d’origine. En effet, la première sculpture installée en 1992 était faite de bois et a été cassée par une bande de…Bref, l’artiste a donc décidé de refaire la statue en acier inoxydable. Cette dernière a pris place en mai 2019.

Mon voyage se poursuit par la traversée d’Amiens sans difficulté. J’ai hâte de retrouver un peu plus de nature. J’arrive au km 11 et là 2 options : continuer tout droit sur la Somme canalisée ou faire un portage pour passer sur la Somme sauvage. Aucune hésitation, la Somme sauvage m’appelle. Je continue ainsi en profitant de la Somme sauvage et je retrouve un peu plus loin la Somme canalisée jusqu’à Ailly, puis Picquigny.

A Picquigny, je vais saluer les personnes de l’office du tourisme avec qui j’avais échangé sur ma venue. Ils ont pour projet de monter un camping insolite pour 2023 sur les bords de Somme, juste au niveau de l’écluse. Projet sympa. Johann de la base de Catiche m’accueille et m’ouvre pour une nuit de bivouac sur la base. Merci à lui pour sa gentillesse et sa disponibilité. Une fois installé, je vais profiter de leur entrainement en eau vive. Il est toujours intéressant de voir comment on gère les éléments, les contres courants….

Jour 3 : Picquigny - Eaucourt sur Somme

Cette deuxième nuit en bivouac fut dure. Fraicheur au rendez-vous, les -3 degrés largement dépassés. Froid, très froid sous la tente. Un sommeil très haché, beaucoup de mal à me réchauffer, bref, c’est ce que l’on appel une mise en situation. Ce qui est donc sur et certain, c’est que le duvet n’est pas suffisant. Heureusement, je dois récupérer un duvet qui a fait le Népal, là, je serai au chaud. Côté tente, le gel s’est installé à l’extérieur comme à l’extérieur. Ma pagaie est recouverte de gel, le SUP également, les sacs sont blancs….bref, c’est l’hiver. Heureusement, Johann m’avait laissé le vestiaire ouvert, je décide donc de prendre 15 minutes pour me réchauffer. Une sale tête se présente dans le miroir. Le but est de voir les limites du matériel, c’est fait, autant continuer dans des conditions plus correctes. Une fois un peu réchauffé, je range le matériel et là la question se pose, tout va être plié humide, génial pour le prochain bivouac du soir. On verra bien.

Je me remets à l’eau sur un bras sauvage de la Somme et c’est reparti, direction Eaucourt sur Somme. Les paysages gelés sont de toute beauté, encore un moment paisible, j’adore.

Encore quelques kilomètres pour retrouver la Somme sauvage. La mise à l’eau n’est pas aisée, cela bouge un peu à cause du barrage et surtout, le ponton est en inox, très glissant par ce temps froid. Mon parcours m’amène jusqu’à Long, avec son château du XVIIIe siècle, château également appelé « la folie de Buissy ». Ce château est une propriété privée ouverte à la visite. Quelques mètres plus loin, je m’attelle à un nouveau passage d’écluse pour lequel je en retrouve pas de mise à l’eau aménagé. J’improvise et reprends ma progression.

De Long, je prends la direction de Pont Rémi puis de Eaucourt sur Somme. Le château de Eaucourt étant en restauration, je monte mon bivouac au niveau de la nouvelle aire de camping-car. Merci à la municipalité de m’avoir autorisé ce bivouac. Nouveau lyophilisé, dont la consistance et disons-le, douteuse, mais globalement ok en goût et séance d’auto hypnose. Et oui, de 16h à 8h30, le temps est long, place à l’introspection.

Jour 4 : Eaucourt sur Somme - Saint Valery sur Somme

Dernier rangement, dernière mise à l’eau avant la fin de ce test matériel. Une descente de la Somme vers Abbeville sans difficulté et un dernier passage d’écluse. Il s’offre à moi une dernière ligne droite de 13km. J’avoue, cette partie n’est pas la partie que je préfère, non pas par rapport à la ligne droite, qui doit être sympathique par updwind, mais par un manque de variation dans le paysage. Après avoir passé quelques ponts tournants, me voilà à Saint Valery. L’équipe support me récupère, merci à eux et retour sur la région parisienne.

Le bilan de cette expérience est riche. Déjà, beaucoup de plaisir à découvrir un nouveau fleuve. Ensuite, le test du matériel m’a permis de voir ce que je devais améliorer, voir ce qui était déjà ok. Il n’y a que par le test que l’on peut voir ce qui nous correspond le mieux, je vous invite donc à suivre ce processus car même avec les meilleurs conseils, nous sommes tous différents et ces petites différences peuvent faire que le voyage se passera plus ou moins bien.

Merci à ce qui m’ont suivi sur les réseaux, merci au Conseil Départemental pour ses autorisations, à la base nautique de Picquigny pour son accueil et au Conseil municipal de Eaucourt pour l’accord de bivouac. Merci à toutes les personnes que j’ai croisées, pour leur sourire, leurs questions et leur bienveillance.

Enfin, merci à Itiwit pour notre partenariat

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